À l’approche des élections européennes sur fond de forts progrès des partis populistes et identitaires, Macron et Merkel, inquiets voire paniqués, se sont mis d’accord sur la stratégie à adopter : faire croire qu’ils vont faire preuve de « fermeté » en matière d’immigration illégale.
Depuis leur rencontre le 7 septembre à Marseille les deux chefs d’État rivalisent de propos « fermes » sur l’immigration. Angela Merkel vient même de conclure avec le gouvernement algérien un accord de retour portant sur 3 à 5 000 de ses ressortissants. Une goutte d’eau dans l’océan des migrants, clandestins ou pas, installés en Allemagne depuis 2014.
De son côté, Emmanuel Macron a, lui, promis des reconduites « pour celles et ceux interceptés en situation irrégulière et qui n’ont pas vocation à obtenir l’asile ». « Tout en respectant nos valeurs ». En réalité, la première année du mandat du président Macron a vu un nombre d’expulsions de clandestins exactement au même niveau que les « bonnes années ». L’immense majorité des clandestins n’est jamais inquiétée.
Au regard de ces déclarations, de cette théâtralisation de mesures insuffisantes, l’axe de campagne des dirigeants de la France et de l’Allemagne pour les élections européennes de 2019 est cousu de fil blanc.
Du reste, la recette commence à être connue. Dans cet article du Figaro daté du 17 octobre 2010, on pouvait déjà lire : « Angela Merkel durcit un peu plus son discours pour faire entendre sa voix dans le débat sur l’immigration qui agite son pays. Ce week-end, la chancelière a simplement et radicalement enterré le modèle d’une Allemagne multiculturelle, où pourraient cohabiter harmonieusement différentes cultures. Cette approche « Multikulti » – « nous vivons côte à côte et nous nous en réjouissons » – a « échoué, totalement échoué », a-t-elle lancé devant le congrès des Jeunesses de sa formation conservatrice. »
Hasard ? Six scrutins régionaux se profilaient alors à l’horizon.
Cinq ans plus tard, emporté par son sentimentalisme et son messianisme de fille de pasteur protestant, elle ouvrait grand les portes de l’Allemagne à plus d’un million de « migrants ». Voilà ce que valent les promesses de campagne d’Angela Merkel et de tous ses semblables qui n’ont la « fermeté » en bandoulière que lors des périodes électorales.
Dorénavant, Merkel a changé de braquet et c’est d’un jour à l’autre qu’elle souffle le chaud et le froid sur la question migratoire. Quelques jours avant l’accord de retour des clandestins algériens, elle inventait des « chasses aux étrangers » suite aux meurtres de jeunes Allemands. Elle a même démis de ses fonctions le chef du renseignement intérieur qui l’avait alors contredit sur l’existence de ces prétendues chasses.
En matière d’ « en même temps », Macron a là une concurrente de choix tout en restant le maître incontesté du genre. Le 29 août, il « endossait le rôle d’opposant principal à Salvini et Orbán ». Le 17 septembre, il plastronnait aux côtés du Chancelier conservateur autrichien promettant de la « fermeté » et des expulsions. Un Chancelier dont d’importants membres de son gouvernement sont justement des proches alliés ou admirateurs de Salvini et Orbán.
Ce grand écart permanent saute de plus en plus aux yeux des Allemands comme des Français et de tous les Européens. La réalité rattrape à grandes enjambées ceux qui voudraient se servir de la question migratoire pendant les élections pour l’oublier ensuite durant leur mandat. Elle devient le sujet central car elle est le sujet vital. Leur « en même temps » craque de tous côtés. Ces imposteurs ne peuvent plus que perdre du terrain.
Jean-David Cattin