Le 8 août dernier, le FBI menait une perquisition spectaculaire au domicile de l’ex-président des États-Unis Donald Trump. Celui-ci a publié un communiqué dénonçant un acte de « persécution politique ». Si les motifs du FBI concernant la perquisition n’ont pas encore été communiqués, ceux-ci sont finalement assez secondaires : ce qui importe dans cette affaire, c’est qu’elle incarne la rupture dont Trump s’est fait le porte-parole durant son premier mandat et la punition dont il fait désormais l’objet. Alors que tout porte à croire que Trump se présentera de nouveau à la candidature de la présidence en 2024 (et qu’il pourrait bien gagner), il est possible de faire le bilan de Trump et de l’avenir possible de la démocratie américaine, plus proche que jamais d’entrer dans sa période césariste.
Trump, acte I : le politique contre la bureaucratie
Dès l’annonce de sa candidature aux primaires républicaines pour l’élection présidentielle de 2016, Donald Trump a subi un barrage d’artillerie médiatique inégalé. Plus encore, il a été la cible d’un nombre invraisemblable d’attaques judiciaires, constituées d’accusations farfelues et sans fondement (sur sa déclaration de revenus, sur des accusations d’agressions sexuelles rapidement abandonnées, etc.) qui se sont amplifiées après son accession à la présidence. Durant ses 4 ans d’exercice du pouvoir, la rébellion de la bureaucratie n’a pas cessé à l’encontre du chef de l’État.
Qu’il s’agisse des juges démocrates, des médias mainstream ou des agences du gouvernement, le harcèlement politique a été ininterrompu. Et, à chaque fois qu’une de ces attaques a échoué, la bureaucratie, le parti démocrate et les néoconservateurs se sont attelés à préparer la prochaine. Les accusations de collusion de Trump avec Poutine pour voler l’élection de 2016 n’ont rien donné : le comité chargé d’enquêter, mené par le républicain anti-Trump Robert Mueller, a pourtant dû avouer au terme de son enquête que rien ne permettait de donner de la substance à ces accusations. De plus, le 45e président est le seul à avoir subi deux procédures (échouées) de destitution. Après les événements du 6 janvier, durant lesquels des supporters de Trump ont décidé de rentrer dans l’enceinte du Capitole pour protester contre les résultats des élections de 2020, une enquête a été ouverte à son encontre. Celle-ci tente de faire porter la responsabilité à l’ex-président de cet événement, dramatisé de façon hystérique par Washington.
Derrière les justifications légalistes et les discours de défense des institutions répétés par les artisans de cette chasse aux sorcières se cache en réalité une lutte politique féroce. Il n’a pas été pardonné à Trump d’avoir transgressé la mécanique bien huilée de l’alternance politique et d’avoir posé les vrais sujets politiques du moment sur la table (immigration, libre-échange, interventions militaires à l’étranger) et d’avoir dénoncé la collusion entre l’ensemble des médias mainstream, les universités, les ONG, la bureaucratie et le parti démocrate.
Trump, acte II : la traversée du Rubicon est-elle possible ?
Parmi les supporters les plus exaltés de Donald Trump, un certain nombre s’est plaint que celui-ci a raté son occasion historique de faire s’effondrer la machine bureaucratique qui empoisonne la république américaine et qui inflige la misère, la tyrannie, l’impérialisme et le remplacement démographique au peuple américain. Selon eux, Trump aurait dû dès les premières attaques à son encontre mener une offensive totale contre la bureaucratie pour restaurer la souveraineté du peuple à l’encontre de tous ceux qui souhaitent concentrer et conserver le pouvoir entre les mains d’une clique constituée par la faction des juges, les départements de sécurité intérieure et le complexe militaro-industriel.
Ce que ces ex-soutiens radicaux, désormais déçus, ne voient pas, c’est qu’une telle entreprise (similaire au coup d’État légal de De Gaulle en 1958) n’est pensable que si le régime est perçu comme profondément corrompu et délégitimé par une frange importante des soutiens du président en place. Or, les républicains trumpistes, s’ils appréciaient le programme du nouveau président, n’avaient pas encore saisi l’ampleur de la flétrissure des institutions légales et bureaucratiques et leur soumission aux intérêts du progressisme social et du globalisme le plus aveugle. C’est justement la lutte acharnée entre Trump et les légions de bureaucrates décidés à la faire tomber qui a révélé à son électorat que la république américaine avait déjà profondément changé de forme. Il ne s’agissait plus, comme dans l’ancien temps, de garantir un système démocratique équilibré destiné à générer une alternance saine et en bonne entente entre républicains et démocrates et qui se solderait par le gouvernement positif du pays. Désormais (et ce depuis plusieurs décennies déjà), la fonction des éléments « neutres » des institutions (FBI, CIA, lobbies divers et variés, juges politisés) était de garantir que jamais l’alternance ne viendrait perturber la lente dérive de la société américaine vers le multiculturalisme brutal, la réduction des libertés politiques et la saignée économique au profit des travailleurs enracinés au profit du marché global. Il fallait d’abord montrer à l’Amérique blanche et conservatrice que sa république était désormais bananière avant d’espérer pouvoir la faire tomber et la rebâtir.
Au vu de la performance désastreuse de Joe Biden et de son déficit de popularité, la victoire républicaine à la présidentielle de 2024 est des plus probables. En outre, la candidature de Trump aux primaires du parti ne fait plus aucun doute, d’autant plus qu’il n’a cessé de continuer à cultiver son influence au sein du camp républicain depuis son départ de la Maison blanche. S’il venait à gagner en 2024, nous pourrions assister à un bouleversement politique aux États-Unis comparable à la parenthèse du New Deal de Franklin Delano Roosevelt entre 1934 et 1938 ou à la reconstruction qui a suivi la guerre civile de 1861.
Endurci par un premier mandat qui a levé le voile sur le pouvoir réel de la bureaucratie, l’électorat de Trump est désormais plus prêt que jamais à suivre son leader si celui-ci venait à décider de traverser le Rubicon. Peut-on s’attendre à ce que 2024 soit l’année de l’avènement d’un césarisme américain ? Il ne reste plus qu’à attendre 2 ans pour avoir la réponse.
Clément Martin