Le féminisme ancienne génération militait pour le droit de vote, le travail des femmes ou encore le droit à l’avortement. Des figures comme Simone de Beauvoir ou Gisèle Halimi, l’une compagne du communiste Jean-Paul Sartre, l’autre défenseur des terroristes FLN, ont incarné le combat féministe au vingtième siècle. Leurs chevaux de bataille étaient déjà critiquables. En effet, on voit mal comment le travail des femmes a constitué un progrès : là où, autrefois, un salaire suffisait à nourrir une famille, il en faut désormais deux pour atteindre un confort relatif. Preuve que le travail des femmes a essentiellement permis la stagnation, voire la baisse des salaires tandis que l’inflation progressait. Une escroquerie en bonne et due forme.
L’ancien féminisme avait l’image d’un combat émancipateur, il visait plus à briser un ancien ordre des choses qu’à bâtir un projet social global. Bien entendu, toute dynamique « libératrice » porte en soi une vision du monde. Le néo-féminisme woke, à ce titre, est bien l’héritier d’une philosophie individualiste qui, dressant la femme en face de l’homme, opposait déjà deux sujets de l’histoire. Comme les marxistes opposent le dominant au dominé, le prolétaire au patron, etc. Toutefois, la bascule est beaucoup plus forte avec le wokisme. Une image saisissante nous en est donnée par un autocollant de l’Union communiste libertaire (plus il y a de mots dans le nom d’un mouvement, moins il y a de militants). « Femmes – hommes, dit le matériel de propagande, partage des tâches partout et tout le temps. »
Le néo-féminisme affiche clairement son ambition totalitaire : il milite pour un changement dans la vie de couple et propose un autre modèle, certainement imposé par la force si ces fous furieux arrivaient un jour au pouvoir. En attendant, ils sont condamnés à se rendre fous mutuellement, à l’intérieur de couples-cobayes du féminisme, névrosés jusqu’à l’os. Le féminisme est en train de devenir une maladie mentale. Il incite des individus pourtant responsables, par nature, à mettre sur le dos du manque d’ouverture intellectuelle du partenaire (masculin, forcément…) l’échec du couple. Ainsi, affirme Mélanie pour justifier sa séparation causée par des conceptions irréconciliables de la vie à deux, « je pars du principe qu’on ne peut pas faire changer les gens malgré eux ». « Malgré mon travail sans relâche depuis deux ans, déclare Alice, c’est toujours pas ça. » Par « travail sans relâche », il faut comprendre « rééducation » (Slate, « Pour un partage des tâches égalitaire, la bonne volonté des hommes ne suffit pas », 21 octobre 2019).
Là où une personne de bon sens évoquerait la paresse, l’égoïsme, le manque d’éducation, de compréhension ou de sens communautaire de son compagnon défaillant, les féministes invoquent un « conditionnement social hérité ». Leur vie de couple est donc le lieu d’une croisade idéologique. Tout y est idéologisé sous la coupe d’une matriarche omnisciente du haut de ses 23 ans, comme Alice, qui parle d’un « devoir d’éducation ». Mais cette démarche, contrairement aux apparences, n’excuse pas l’homme honni. Au contraire, elle en fait un enfant, et à défaut de conversion woke, elle le désigne comme ennemi. Il faut bien comprendre que le néo-féminisme woke n’est pas une idéologie comme une autre mais, peut-être, un jour, sera rangé au catalogue des troubles obsessionnels.
Clément Martin