Tribune de Clément Martin sur le site Novopress.
Croire qu’il existe en France une masse conséquente de « musulmans patriotes » dissimule souvent une forme de cécité volontaire. Face à un clivage ethnico-religieux de plus en plus explosif, certains pensent que psalmodier « ils existent et sont de plus en plus nombreux » suffira à exorciser une réalité douloureuse.
À l’appel de différentes personnalités, une manifestation contre l’État islamique a eu lieu le 13 décembre dernier au Trocadéro. L’association musulmane « Fils de France » exhortait les musulmans à venir y clamer leur dégoût du califat et leur amour de la France. Ce fut un flop. Moins d’une centaine de personnes ont répondu présent, dont une large partie de non-musulmans. Mais au-delà de ce raté, existe-t-il en France un nombre important de « musulmans patriotes » ?
Il suffit d’étudier les statistiques. En 2012, lors de l’élection présidentielle seuls 4 % des électeurs musulmans ont porté leur suffrage sur Marine Le Pen (IFOP, 2012). En 2007, ils étaient 2 % à avoir voté pour le candidat du Front National Jean-Marie Le Pen, malgré ses nombreux appels du pied envers cette communauté durant la campagne électorale. Plus récemment, à l’occasion des élections municipales, un article de Slate — se basant sur une autre étude de l’IFOP — révèle que dans les arrondissements marseillais où Stéphane Ravier (maire FN) a été élu, « les 8 bureaux comptant plus de 50 % de prénoms musulmans sur les listes électorales ont sans exception placé la liste de gauche en tête, comme 8 des 9 bureaux en comptant entre 35 et 50 %. Inversement, le FN s’est imposé dans 28 des 32 bureaux “potentiellement les moins musulmans” du secteur et dans 13 des 19 bureaux présentant 11 à 20 % de prénoms musulmans. » (Le « verrou » du vote FN cède chez les électeurs juifs, pas encore chez les musulmans, 29/10/2015)
Le clivage n’est en rien social. En observant le vote des ouvriers et des employés, on s’aperçoit que Marine Le Pen ne rallie que 5 % des voix de ceux se déclarant musulmans tandis que François Hollande obtient le score écrasant de 63 % dans la même catégorie. Alors même que la candidate du Front National réalise 29 % au sein de l’ensemble des ouvriers et des employés et devance tous les autres candidats. C’est dire si la fracture est profonde.
Un argument souvent avancé pour défendre l’idée d’un « patriotisme musulman » est l’exemple historique des harkis. Plutôt défendue par des personnes âgées ayant connu l’époque coloniale, cette idée étonne tout d’abord par son anachronisme. Il constitue d’autre part un aveu de faiblesse : depuis 40 ans d’immigration massive, il n’y a donc aucun autre exemple ? Pour étayer cette thèse, il est donc nécessaire de remonter au siècle dernier ?
Il est par ailleurs intéressant de constater que les enfants de harkis sont loin d’être tous des amoureux inconditionnels de la France. Gilles Keppel, professeur à Sciences-Po et orientaliste l’avouait dans les colonnes de l’Express : « À Roubaix, une bonne partie des mosquées salafistes sont tenues par des enfants de harkis. Ils ont dû faire face pendant des décennies à la stigmatisation des enfants du FLN, le parti au pouvoir en Algérie, qui les qualifiaient de traîtres. Ceux-là qui, aujourd’hui, portent la djellaba raccourcie et la barbe peuvent en remontrer à un enfant du FLN, qui boit de la bière. » (11/06/2014)
Camel Bechickh, président de l’association Fils de France est souvent présenté comme un modèle de musulman assimilé. Pourtant, nul besoin de chercher très loin pour découvrir la face trouble du personnage.
Membre de l’organisation islamiste UOIF, il apporte un soutien sans faille à Tarik Ramadan qui « pour peu qu’on lui fiche enfin la paix avec l’accusation de double discours, aurait, s’il se rapproche plus encore des pistes novatrices de Tareq Oubrou, beaucoup à apporter » (Boulevard Voltaire, mars 2015).
Il n’hésite pas non plus à inviter à son université d’été l’imam UOIF Hassan Iquioussen, régulièrement épinglé pour propos à connotation antisémite et apologie du djihad. Disqualifié par ses accointances islamistes, Camel Bechickh reste néanmoins l’invité privilégié des cercles proches de la Manif Pour Tous.
Camel Bechickh incarne en réalité beaucoup plus la difficulté de l’assimilation que sa réussite : il vient du Berry, son père était maraîcher, il a vécu toute sa vie à la campagne au milieu de non-musulmans et a passé sa scolarité dans un établissement privé catholique. Pourtant, il est toujours musulman. Et qui plus est, à l’UOIF…
Son mentor est Tarek Oubrou, un imam de Bordeaux présenté partout comme « modéré ». Là encore, nul besoin de chercher bien loin pour découvrir des accointances islamistes. Dans une vidéo toujours disponible sur internet, il explique sans complexe que « la réunion des musulmans autour du Calife est une obligation, et tant que les musulmans ne sont pas réunis autour du Califat, ils sont des pécheurs, sauf ceux qui œuvrent pour instaurer ce Califat ! » L’amour de la France semble être une préoccupation très lointaine pour lui.
Au mois de novembre, des dizaines de médias ont titré « 400 responsables musulmans réunis à Paris pour dénoncer le terrorisme ». Lors de ce rassemblement, « une Marseillaise » aurait été entonnée à pleins poumons par les participants. Étrangement, il est impossible de trouver des photos ou des vidéos de ce moment historique. Un oubli sans doute…
Croire qu’il existe en France une masse conséquente de « musulmans patriotes » dissimule souvent une forme de cécité volontaire. Face à un clivage ethnico-religieux de plus en plus explosif, certains pensent que psalmodier « ils existent et sont de plus en plus nombreux » suffira à exorciser une réalité douloureuse.
Pourtant, le comportement — électoral ou culturel — de la majorité des musulmans de France manifeste une nette volonté de ne pas s’assimiler, quand il ne s’agit pas de défiance ou d’une franche hostilité vis-à-vis de la France et de la civilisation européenne. Et cette tendance ne va aller qu’en s’accentuant. La réislamisation touche en effet de plein fouet la jeunesse arabo-musulmane qui, par exemple, respecte davantage les prescriptions alimentaires que ses aînés (étude d’Hugues Lagrange, 2013), attache plus d’importance au port du voile et figure en tête des classes d’âge impliquées dans les filières djihadistes.
Plutôt que de chercher à se rassurer en minimisant la fracture communautaire dans notre pays, ou bien de croire naïvement que le salut viendra des autres, il faut regarder la réalité en face. La cohabitation sur un même territoire d’une population d’origine européenne et d’une population musulmane en expansion démographique permanente va se faire sur fond d’aggravations croissantes des tensions communautaires. Après une année 2015 où près de cent cinquante de nos compatriotes ont trouvé la mort dans un attentat islamiste, continuer de mettre en exergue un fantomatique groupe de « musulmans patriotes » aussi introuvable qu’inexistant ne relève plus seulement de la cécité volontaire. Il participe bel et bien à favoriser l’idée criminelle qu’un « vivre-Ensemble » est encore possible, au moment même où les faits démontrent — malheureusement dans le sang — qu’il n’en est rien. Pour éviter de nouveaux drames, il n’y a désormais qu’une seule solution : la remigration, c’est-à-dire le retour dans leurs pays d’origine d’une partie conséquente de la population de confession musulmane. Toute volonté de faire perdurer des mythes incapacitants et démobilisants n’a pour résultat que d’entraver la marche en avant de cette idée, pourtant seule solution réaliste et adaptée à notre temps pour préserver la paix en France et sur notre continent.